Une pièce de théâtre sur la misère humaine, la violence, l’enfance malheureuse et qui pourtant se finit sur une note d’espoir, il fallait oser ! Le jeune comédien et auteur Julien Romano a relevé le défi avec brio.
« L’ImpassE », qui se joue en ce moment au théâtre Clavel, constitue une expérience scénique et théâtrale unique. À titre personnel, ayant eu le privilège d’assister à des centaines de pièces, je n’ai jamais vu une telle prise de risque dans un spectacle vivant.
De quoi s’agit-il au juste ?
Deux frères se retrouvent dans un jardin public, c’est l’automne, il fait froid, et les feuilles mortes jonchent le sol. Une jeune femme enceinte assise sur un banc à côté guette leurs échanges. Immédiatement, les comédiens nous font sentir un rapport de force, une violence verbale qui, à tout moment, peut conduire à une violence physique.
Le plus jeune des frères, incarné par Jonathan Bruzat, commence un dangereux exercice de provocation envers
son aîné, interprété par Julien Romano, également auteur et metteur en scène de la pièce.
Peu à peu, la provocation aboutira à l’inévitable, des sentiments enfouis depuis longtemps ressurgiront.
Un drame familial presque palpable va alors éclore devant nous, spectateurs médusés par la performance d’acteurs.
À la joute verbale vont succéder les cris de douleur et de colère des deux frères pour laisser place à la brutalité.
La jeune femme enceinte tentera tant bien que mal de réconcilier ces deux frères fragiles, brisés par une enfance misérable.
Avec « L’ImpassE », nous côtoyons la pauvreté, la « France d’en bas », dans ce qu’elle a de plus viscéral ; le manque d’argent, d’éducation et d’amour maternel n’offriront à ces deux êtres qu’un choix difficile, l’espoir, la lumière ou bien la vengeance et le meurtre.
Nous insistons sur l’interprétation magistrale de Julien Romano.
Ses cris, pour exorciser la douleur de son personnage, nous font penser à la prestation de l’immense acteur allemand Bruno Ganz dans le film « La Chute » où il incarnait un Adolf Hitler à l’agonie, hurlant sur ses généraux.
La scène où l’aîné des frères lynche le plus jeune nous a laissé effaré sur notre siège, quel jeu d’acteur !
En conclusion, il faut impérativement aller voir « L’ImpassE », au théâtre Clavel, pour deux raisons : changer de registre et éviter pour une fois le théâtre de boulevard et surtout vivre une expérience, ressentir des émotions, et nous faire ressortir de la salle en nous interrogeant sur notre existence, nos soucis quotidiens pour mieux les mettre en perspective. « L’ImpassE » vous procurera tout cela à la fois.
Un grand bravo à Julien Romano, Jonathan Bruzat et Karen Peyrard ! Des spectacles comme celui-ci sont rares, il ne faut pas les rater.
« L’ImpassE », c’est en ce moment au théâtre Clavel, à Paris, le mardi et le mercredi à 20h00.
Laurent Amar
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